Une conférence des États membres se réunit deux fois par an
en sessions ordinaires, ici en 2007. (©OPEP)
À RETENIR
- L'OPEP
est une organisation intergouvernementale réunissant 15 pays
producteurs de pétrole (7 en Afrique, 6 au Moyen-Orient et 2 en Amérique
du Sud). Son objectif historique est l’orientation à la hausse des
cours du pétrole et la maîtrise de son cycle de production.
- En
2017, l’OPEP a compté pour 42,6% de la production mondiale de
pétrole. Les réserves prouvées de ses pays membres atteignaient 1
218,8 milliards de barils à fin 2017, soit 71,8% des réserves mondiales.
- L'influence
de l’OPEP sur les cours du pétrole a chuté depuis les années 1990, à
l’image de sa part dans la production mondiale.
Sommaire
Définition et catégories
L’OPEP (Organisation des Pays Exportateurs de Pétrole),
dénommée OPEC en anglais (Organization of Petroleum Exporting Countries), est
une organisation intergouvernementale fondée à l’issue de la conférence de
Bagdad le 14 septembre 1960 par l’Arabie saoudite, le Koweït, l’Irak, l’Iran et le
Venezuela.
Cette organisation est créée à l’initiative de Juan Pablo
Pérez Alfonzo, alors ministre du développement du Venezuela, qui souhaite en
faire une force de régulation du marché pétrolier. Elle vise à rééquilibrer les
relations entre les pays producteurs et les compagnies pétrolières occidentales
qui régissent le marché depuis sa création à la fin du XIXesiècle.
L'OPEP réunit aujourd'hui 15 pays membres : l'Algérie,
l'Angola, l'Arabie saoudite, le Congo, l'Équateur, le Gabon, la Guinée
équatoriale, l'Iran, l'Irak, le Koweït, la Libye, le Nigéria, le Qatar, les
Émirats arabes unis et le Venezuela.
Au-delà du contexte économique, l’action de l’OPEP sur
l’évolution des prix du pétrole est étroitement liée à l’environnement
géopolitique. L’influence de l’organisation décroit depuis les années 1990, à
l’image de sa part dans la production mondiale de pétrole (55% en 1970, 42,6%
en 2017(1)).
Fonctionnement
Le premier objectif de l’OPEP est l’orientation à la hausse
du cours du pétrole et la maîtrise de son cycle de production.
Mi-2014, l'Arabie saoudite, qui a historiquement joué le rôle de « swing
producer », a toutefois privilégié la
défense de ses parts de marché face à l'augmentation de la production
américaine, dans un contexte de forte chute des cours. Fin
2016, l'OPEP a conclu avec onze pays non membres de l'organisation (dont
la Russie) un accord visant à réduire l’offre globale de pétrole sur les
marchés et faire ainsi remonter les prix.
Depuis 1982, l'OPEP dispose d'un système de régulation de la
production et du prix de vente au moyen d'un montant total de production
(légèrement supérieur à 30 millions de barils de brut par jour). Ce volume
de production est défini en fonction des réserves des pays membres et est
ajusté en fonction des besoins des pays consommateurs (le système de quotas de
production par pays membre a été arrêté en 2011). À ce titre, l’OPEP est
parfois présentée comme un cartel de producteurs malgré les
dissensions internes. L'accord conclu fin 2016 avec d'autres producteurs
hors OPEP (« OPEP+ »), prolongé
depuis à plusieurs reprises, précise à nouveau des plafonds de production
pour chacun de pays membres de l'organisation.
L’OPEP gère un « panier » qui fixe un prix de référence à
partir des prix de quinze pétroles bruts aux qualités différentes.
Le fonctionnement de ce système de régulation est toutefois
affecté par les fluctuations du cours du dollar, monnaie de transaction du
pétrole : le pouvoir d’achat des pays producteurs diminue lorsque le cours
du dollar baisse et inversement.
De plus, l’OPEP gère un instrument de quantification :
le panier de l'OPEP (ORB)(2) qui
fixe un prix de référence à partir des prix de quinze pétroles bruts (un par
pays membre) aux qualités différentes reflétant les principales exportations de
bruts des pays membres (par exemple, l'« Arab Light » d'Arabie
saoudite). Entre juin 2015 et décembre 2015, le prix moyen du pétrole au sein
de ce panier a baissé de 44% (pour atteindre 33,6 $ par baril en moyenne en
décembre 2015). Il a depuis plus que doublé, atteignant 72,3 $/b en août
2018(3).
Ce panier est concurrencé par le WTI
et le Brent dont les prix ne diffèrent le plus souvent que de quelques
centimes. La gestion de la production et des prix est prolongée par
l’évaluation périodique des réserves disponibles.
Le cartel de l'OPEP est également un organe de collecte, de
traitement et de diffusion d’informations sur le pétrole et sur l’environnement
économique de cette ressource (ex : diffusion mensuelle de rapports sur le
marché du pétrole).
Passé et présent
Entre février 1959 et 1960, les grandes compagnies
pétrolières occidentales imposent des baisses de prix du pétrole pour affaiblir
leurs concurrents. Cela affecte les revenus pétroliers des pays producteurs qui
ont un statut de concédants et qui perçoivent des royalties basées sur des taux
dérisoires et des taxes tout aussi modérées. Les 5 pays fondateurs (à l’origine
de 82% des exportations mondiales) se réunissent au sein de l’OPEP alors
que les 8 compagnies majors(4) contrôlent
90% de la production et 75% de la capacité mondiale de raffinage.
Jusqu'au début des années 1970, l'OPEP ne parvient pas à
provoquer une hausse des prix du pétrole en raison de ses rivalités
internes et de l’inexpérience de ses membres. Son influence est aussi largement
entravée par des causes externes telles que la surabondance de l’offre,
notamment due à l’exploitation de nouveaux gisements au Moyen-Orient.
En 1971 et 1972, une vague de nationalisations de la
production influe sur les relations entre pays producteurs et compagnies
pétrolières exploitantes.
Durant les années 1970, les pays de l'OPEP contrôlent plus
de 55% de l'offre mondiale de pétrole et fixent des quotas de production. Les
pays producteurs renforcent leur coopération dans un contexte de demande
croissante. Entre 1970 et 1973, le prix du baril de pétrole passe ainsi de 1,80
$ à 3,01 $.
En 1971 et 1972, une vague de nationalisations de la
production (Algérie, Egypte, Syrie, Irak) influe sur les relations entre pays
producteurs et compagnies pétrolières exploitantes. Le système des concessions
tombe peu à peu en déshérence, remplacé par des « joint ventures » :
compagnies étrangères et États créent une société d’exploitation dont le
capital est réparti à parts égales, soit 50% du permis pétrolier pour chacun(5).
En octobre 1973, la guerre du Kippour entre Israël et
l'Égypte(6) déclenche
le premier choc pétrolier : les principaux producteurs du golfe
Persique décident d'augmenter de 70% le prix du baril de pétrole brut. L’OPEP
organise un embargo pétrolier contre les pays qui soutiennent Israël et réduit
sa production de 25%. En décembre 1973, deux mois après le début de la guerre,
la hausse moyenne du prix du baril a atteint 130%. Après 1973, sous le contrôle
de l'OPEP, le prix du pétrole se stabilise à la hausse aux alentours de 10 $
par baril.
La révolution iranienne en 1979 puis la guerre Irak-Iran en
1980 provoquent une nouvelle crise pétrolière. Le prix du baril dépasse alors
35 $. La réaction des pays consommateurs de l’OCDE, représentés notamment
par l’AIE, modère le pouvoir pris par l’OPEP.
En 1982, un contre-choc pétrolier (baisse des prix) est
initié par l’Iran qui souhaite augmenter sa part de marché et ainsi financer la
guerre contre l’Irak. La baisse de prix du baril à 15 $ décide l’OPEP à adopter
le système des quotas par pays membres (en vigueur jusqu'en 2011). L’OPEP connaît
alors l’apogée de son influence et constitue une vraie force de régulation des
cours.
Au cours des années 1990, l'influence de l’OPEP sur les prix
des cours décline pour trois raisons : des divergences internes et la
violation des quotas de production par certains de ses membres, l’échec
d’extension de sa zone d’influence aux nouveaux producteurs (Russie, Mexique,
Norvège, Royaume-Uni, Colombie, etc.) et l’influence des marchés de Londres et
de New York qui orientent notablement les cours.
Enjeux
Après avoir limité son action à l’amélioration des recettes
tirées de l’exploitation pétrolière par les pays membres, l’OPEP est devenue un
interlocuteur économique majeur capable d’influer sur le prix d’une ressource
stratégique. Elle est aussi implicitement devenue un acteur politique de
premier plan, en particulier dans le cadre du conflit israélo-palestinien.
Emmenée par l’Arabie saoudite, l'OPEP a pour objectif de
concilier l’optimisation des revenus de ses membres et la gestion sur le long
terme de leurs ressources pétrolières tout en préservant la stabilité des
relations et des échanges avec les pays clients.
La réalisation de cet objectif paradoxal implique un
contrôle permanent sans faille des prix mondiaux du pétrole. À
partir de mi-2014, l'Arabie saoudite a toutefois refusé à plusieurs
reprises de réduire sa production afin d'éviter de perdre
des parts de marché au profit des États-Unis, devenu premier producteur
mondial grâce à l'exploitation de ses hydrocarbures non conventionnels. Fin
2016, Riyadh a décidé avec les autres membres de l'OPEP, puis avec d'autres
producteurs non membres de l'organisation dont la Russie, de plafonner à
nouveau la production pétrolière pour faire remonter les cours.
La Russie, non membre de l'OPEP, produit autant que
l’Iran, le Nigéria, le Venezuela, l'Algérie et l’Équateur réunis.
Cinquante ans après sa fondation, l’OPEP doit relever trois
défis majeurs qui perdurent depuis les années 1990 :
- la
résolution des nouveaux conflits internes : la fracture entre
membres pro et anti-Américains exacerbe ces conflits. L’Arabie saoudite,
alliée traditionnelle des États-Unis, est confrontée à l’Iran et au
Venezuela, deux des pays les plus ouvertement anti-Américains dans le
monde, qui contestent son influence sur l’organisation. Au-delà des
divergences idéologiques, une frontière se dessine entre les pays pour qui
l’OPEP doit avant tout être l’animateur d’un marché de matières premières
et ceux désireux d’en faire une arme plus politique ;
- la montée en puissance de la Russie…et des autres : l’OPEP est le seul cartel dans son domaine et ne possède pas de moyen de pression sur les États qui n’en sont pas membres, notamment sur la Russie. Dopée par des investissements importants et des réserves a priori substantielles, la Russie s’est engagée dans une course à la production. Avec 11,3 millions de barils par jour en 2017(7), la Russie produit autant que l’Iran, le Nigéria, le Venezuela, l'Algérie et l’Équateur réunis. Fin 2016, le pays s'est engagé aux côtés de l'OPEP à plafonner sa production afin de faire remonter les cours du pétrole.La production croissante d'hydrocarbures non conventionnels aux États-Unis (qui ont fait du pays le premier producteur mondial avec 13,1 millions de barils par jour en 2017) est également susceptible de réduire l'influence de l'OPEP. Si cette influence tient encore à ses réserves d’hydrocarbures annoncées comme les premières au monde, personne ne sait les évaluer avec précision. Les nouveaux gisements découverts notamment au Canada ou au large du Brésil pourraient bouleverser la répartition mondiale de ces réserves et donc diminuer significativement la part de l’OPEP. Dans un contexte économique mondial difficile, la consommation de pétrole est soutenue par la croissance des BRIC (Brésil, Russie, Inde et Chine). Sauf à convaincre de nouveaux États d’adhérer à son organisation, l’influence de l’OPEP sur les cours du pétrole pourrait décliner ;
- les
déclins simultanés de son influence et de l’économie pétrolière :
la dépendance des pays industrialisés envers le pétrole décline (ex
: la facture pétrolière de la France représentait 4% de son PIB en
1980 et 2,1% en 2014). A contrario, les pays de l’OPEP restent
très dépendants du pétrole. À l’exception du Koweït et du Qatar, les
membres ont encore peu développé un modèle économique pérenne pouvant
relayer l’industrie pétrolière, or les revenus pétroliers représentent en moyenne
plus de la moitié de leur PIB. Dans
ce contexte, l'Arabie saoudite a développé une « Vision 2030 » visant
à diversifier son économie. Les contextes politiques favorisent une
certaine atonie dans la mesure où une partie importante des revenus du
pétrole finance en priorité des activités militaires ou de maintien de
l’ordre. Notons que la consommation de gaz naturel croît plus vite que
celle de pétrole, ressource à laquelle se limite l’OPEP.
La conjugaison de ces facteurs affaiblit l’influence
géopolitique de l’institution OPEP. Ce déclin est mis en exergue par la
concurrence des marchés organisés apparus au début des années 1980. Ces marchés
tels que le New York Mercantile Exchange (NYMEX) gèrent des contrats à terme ou
des options dont les prix servent de plus en plus de référence de marché (le
volume de pétrole brut traité par des contrats à terme a dépassé le volume de
la production mondiale).
Acteurs
Le siège de l’OPEP est basé à Vienne (Autriche) et abrite
les services du seul organe permanent, le secrétariat général, l’organe
exécutif chargé de faire appliquer les résolutions de la conférence ou les
décisions du conseil d’administration.
Le secrétaire général en poste depuis août 2016 est le
Nigérian Mohammed Barkindo.
L’OPEP regroupe actuellement 15 pays membres :
Afrique
- l’Algérie :
membre depuis 1969. Premier pays à avoir nationalisé la production
d’hydrocarbures ;
- l’Angola :
membre depuis 2007. Une des plus grandes zones d’exploration,
principalement menée comme la production par les grandes compagnies
pétrolières de l’OCDE ;
- le
Congo : dernier pays membre ayant rejoint l'organisation (à l'été
2018) ;
- le
Gabon : membre qui avait quitté l'organisation en 1995 et
qui l'a à nouveau rejointe en juillet 2016 ;
- la
Guinée équatoriale, pays ayant rejoint l'OPEP en mai 2017 ;
- la
Libye : membre depuis 1962. Un très grand potentiel
d’exploration non exploité en raison du conflit touchant ce pays ;
- le
Nigéria : l’industrie pétrolière la moins nationalisée de
l’OPEP ;
Amérique du Sud
- le
Venezuela : pays disposant des premières
réserves de pétrole au monde grâce à ses ressources en sables
bitumineux mais rencontrant de
graves difficultés économiques ;
- l’Équateur :
membre entre 1973 et 1992 puis à nouveau depuis 2007(8) ;
Moyen-Orient
- les
Emirats arabes unis : membre depuis 1967. Un grand producteur
aux réserves a priori déclinantes ;
- l’Arabie
saoudite : membre fondateur. Leader traditionnel de l’OPEP.
Deuxième pays producteur au monde. Possèderait les plus vastes réserves
conventionnelles ;
- l’Iran :
membre fondateur. Deuxième plus grand producteur de l'OPEP et quatrième
plus grand exportateur de pétrole brut dans le monde ;
- l’Irak :
membre fondateur. Une production montant en puissance depuis la fin du
conflit conduisant à la chute de Saddam Hussein ;
- le
Koweït : membre fondateur. Un gisement unique dont le pic de
production serait atteint ;
- le
Qatar : membre depuis 1961. Des réserves de brut limitées, le
pays se distinguant davantage par ses ressources gazières (3es réserves
prouvées au monde).
Chiffres clés
Les réserves prouvées en pétrole des pays de l’OPEP
atteignaient 1 218,8 milliards de barils à fin 2017, soit 71,8% des réserves
prouvées dans le monde, selon les données de BP.
Il est à noter que, dans la mesure où la valorisation des
compagnies pétrolières et la notation des pays producteurs dépend pour une part
importante de l’appréciation des réserves, les montants communiqués, en
particulier par l’OPEP, sont souvent surestimés.
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